Alors voilà, il y a des petites choses en Norvège qu’on a définitivement adoptées et qui font partie de notre routine du soir et du week-end, et en écrivant ces lignes je pense de suite au Flatbrød (littéralement “pain plat”) qui est une sorte de… crêpe sèche, sans goût spécial mais craquante et très fine, si fine que le rapport Garniture / Flatbrød tend vers l’infini : Infini de Houmous, Infini de Pâté et même Infini de Foie Gras. Moins de pain et plus de garniture, voilà un bon slogan!
Mais je ne voulais pas parler de Flatbrød. Enfin si, bien sur, parce que j’ai l’impression d’avoir perdu quelques années de ma vie à ne pas connaître l’astuce, mais ce n’est pas précisément le sujet du jour.
Je voulais parler de Kos (prononcez “cousse”, comme dans couscous).
Il n’y a pas de traduction directe ni en français ni en anglais – l’adjectif Koselig (kousseli) peut se traduire par cozy, confortable, mais ramener ça à du confort est déjà une perte de sens.
Le Kos, c’est le fait de rentrer chez soi au chaud alors qu’il pleut ou qu’il fait froid dehors, d’enlever immédiatement ses chaussures parce qu’un norvégien enlève toujours immédiatement ses chaussures, puis d’allumer quelques lumières et s’installer tout au fond du canapé avec des petits gâteaux au chocolat. Le Kos peut prendre plusieurs formes : il consiste aussi à ouvrir un paquet de chips le vendredi soir, avant de manger de la pizza et de faire péter les bulles de soda. Celui-là, c’est le Fredagskos : le Kos du vendredi soir – il est très spécial, il mérite une partie à lui tout-seul :
D’abord, le Kos du vendredi commence tôt dans la journée et les cantines d’entreprise vous proposeront au choix ce jour-là : pizza, tacos ou burger (un seul plat à la fois, mais ça tourne chaque semaine). Oubliez le jour du poisson français, le vendredi est officiellement le jour où on mange n’importe comment et le plus gros dilemme est d’accorder le plat du vendredi soir dans un couple : à midi t’as mangé des tacos et moi de la pizza… bon ce soir on fait steak-frites ? Pour ne vraiment pas rater le Fredagskos, les supermarchés réarrangent leurs rayons toutes les semaines pour que l’essentiel du Tacos soit à portée de main.
Le Fredagskos a une chanson en son honneur faite par KIMs, une marque de chips (ce ne sont pas les meilleures, nous on préfère les Sørland’s). La publicité a quelques années mais elle a été remasterisée cette année et tous les vendredis je n’ai qu’une chanson en tête : Det er tid for Fredagskoooooooooooos
Les paroles en norvégien sont là, je vous les traduis ci-dessous :
Il y a un jour où l’on peut souffler,
On se libère de l’agitation du chef, et on rentre enfin à la maison
Since I moved here, all I do is Kos and Kos
Yes we do!
C’est le moment du Fredagskos
Pas de KIMs pas de Kos
C’est le moment du Fredagskos
Pas de KIMs pas de Kos
Oui le week-end est arrivé c’est le moment du Fredagskos
Dernière preuve que le Fredagskos est la grande fête hebdomadaire des chips, pizza, soda, tacos, nachos, burger, frites, etc : en Norvège les entreprises aiment se choisir des valeurs, c’est à dire des mots qui font joli mais bon quand même, ça va pas changer notre façon de travailler et on se demande combien est dépensé pour aligner trois ou quatre mots. Exemple : “Honnêteté, Droiture, Précision”, “Ouverture, Sérieux, Clairvoyance, Travail”. Bon vous avez compris. Eh bien un de mes anciens employeurs avait choisi des valeurs pour que les premières lettres forment le mot PIZZA ! nan c’est pas vrai, c’est pas facile de trouver deux mots en Z qui collerait au message, mais c’était un des autres mots donnés au début du paragraphe : Bonjour chers employés, n’oubliez pas nos valeurs : B.U.R.G.E.R ! (à remplacer au choix par C.H.I.P.S ! T.A.C.O.S ! S.O.D.A ! F.R.I.T.E.S !)
Le Kos du vendredi et son influence sur les entreprises norvégiennes (source de l’image : wikipedia)
Maintenant que vous maîtrisez le Fredagskos, étudions le Kos suivant : le Helgekos, le Kos du week-end.
Il y a un piège parce que bien sur le vendredi soir fait partie du week-end et, de loin, les résultats Google Images sont proches entre le Fredagskos et le Helgekos. Alors soyons précis : les Tacos se font le vendredi soir, tandis que des pizzas surgelées Grandiosa cuisent toute la semaine et même à Noël.
Nous, on pratique le Helgekos toute l’année, mais le Kos du week-end durant l’hiver (le Vinterkos, bravo!) c’est sans doute le plus savoureux. Quand le soleil se lève officiellement à 9h30 et se couche à 15h30 et surtout QUAND IL FAIT PUTAIN DE */-@5£?}! GRIS TOUTE LA JOURNÉE (Bergen, mon amour), le Kos est l’harmonie et la lumière de notre foyer – ça et nos 10 lampes allumées dans le salon (on a un grand salon et un grand besoin de lumière)(on est très mal intégrés : en vrai les norvégiens auraient 3 bougies et diraient “oooohh, så koseliiiiiig!”). C’est donc avec légèreté, sweatpants et grosse polaire sur le dos que nous faisons harmonieusement nos mug-cakes du week-end d’après une recette précise, où je remplace néanmoins la crème fraîche par du lait et le fromage blanc par du yaourt. Puis nous prenons une tasse de café (j’avais dit que je ne buvais pas de café hors entretien d’embauche, mais le Kos est une autre exception) et nous regardons plein d’espoir les épreuves de biathlon à la télé, espérant voir Martin Fourcade et Marie Dorin-Habert botter le cul des norvégiens qui se la pètent vraiment trop dans ces sports-là – il faut entendre les commentateurs quand le relai de ski de fond hommes est gagné par les équipes de Norvège, Norvège 3 et Norvège 2!
Maintenant que vous maîtrisez parfaitement le Kos du vendredi et le Kos du week-end, saurez vous deviner ce qu’est le Julekos ? (prononcez iuleukousse)
indice chez vous : “Jul” signifie Noël
Photo de Pepperkakebyen, la ville de pain d’épices. Voir éditions 2014 et 2013
J’aime vraiment beaucoup lire ces petites anecdotes de la vie quotidienne Norvégienne
Au Québec aussi on aime passe du temps chez nous en hiver, mais personne n’a inventé de tradition pour ça… Je crois que c’est très nordique comme mode de vie !
Merci, ça fait plaisir de savoir que ce genre de billet ne plait pas qu’à mes parents
Effectivement, je me disais que le Kos devait aussi se retrouver sous une forme ou sous une autre au Canada, où il y a toutes les bases pour que ca arrive (froid, hiver long & comfort-food).